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Extrait du livre

A Henri Détrie

Mon grand père

                    Si tu ne sais pas où tu vas, souviens-toi d'où tu viens. [Proverbe Africain]

  

La bataille de Luchy

 C’est 2.500 morts

(Le 6 juin 1944, pour le débarquement, c’est 3.000 morts)

4.434 français et 1.800 allemands hors de combat.

Des villages du Tarn et Garonne perdent en une après-midi leurs forces vives.

La plupart avait 20 ans

Un 22 août 1914

 Le Colonel Henri Détrie

Extraits de lettres, documents, témoignages …

Amis lecteurs, chaque livre est à tirage unique, c’est une œuvre collective,  participez à son élaboration et envoyez vos documents à grognet.jl@sfr.fr

  

PREFACE

 

Aujourd’hui, 100 ans après cette bataille effroyable, Anne Marie Lambert  en perpétue le souvenir.

Voici son témoignage

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Passant
Arrête et salue.
Laisse un peu de ton cœur
A ceux qui sont mort pour toi (stèle Détrie)

 Printemps 1980

    Après une longue marche en forêt avec papa, nous faisons une halte à proximité de la stèle du Colonel Détrie.

    Réchauffés par un soleil printanier, nos pensées convergent vers cet après-midi sanglant du 22 août.

    Papa s’exprime. « Te rends-tu compte que cette terre chargée d’humus de vie a reçu le sang de tant de jeunes vies voilà plus de 60 ans. »

     C’est loin et ça reste proche. Notre pensée s’envole vers les traces laissées en terre flamande par un de mes oncles maternels.

    Nous continuons notre marche et apercevons la stèle de votre aïeul.

    Papa très contrarié en voyant les lieux s’exprime très violemment.

    Est-ce possible de laisser se détériorer de tels monuments. Nous avons le devoir de sauver ces stèles, derniers témoins de ce sanglant 22 août 1914. L’élément déclencheur est présent. Quelques jours plus tard, nous commençons ce travail de longue haleine.

Une dame et son fils nous apportent une remorque de terre pour former un tertre. Nous le fleurissons et pendant plus de 20 ans l’entretenons avec respect et souvenir ;

    Nous rénovons les 3 autres stèles. Des édiles communaux acceptent cette « lubie » (terme employé par un bourgmestre) mais lorsque nous demandons de l’aide (déplacement d’une stèle) il faut quelques années de réflexion à ces personnes.

Décembre 2000


            Sous la neige et une bise cinglante, je fais le tour des 4 stèles un dimanche matin.

    Stupeur !  La stèle disparait sous une avalanche de sapins de Noël. Le terrain alentour est sillonné d’ornières très profondes.

    Le lendemain, prise de contact avec l’instituteur, les enfants et le bourgmestre.

    Les enfants sont partie prenante pour mesurer le terrain et réaliser la maquette d’un parc.

    La stèle sera sauvée.

En mai, les parents d’élèves exécutent les travaux pour réaliser ce parc. Les enfants récoltent des plantes chez l’habitant et avec un garde forestier nous récoltons des semis naturels de hêtres, ainsi vient de naitre le parc du souvenir avec l’aide oh ! combien efficace des enfants et de leurs parents.

Septembre 2011

                Avec l’aide de la FTLB (fédération Tourisme Luxembourg Belge) réalisation et implantation du panneau didactique retraçant le mouvement des 2 troupes dans la forêt et la campagne d’Ochamps.

    Je suis la locomotive, mais d’innombrables wagons de bénévolat s’accrochent pour former le train de solidarité.

    Mon colonel, je vous imagine bras tendus pour relier vos petits-enfants biologique à vos petits-enfants spirituels de Belgique.

    Merci mon Colonel, le train de solidarité s’allonge.

Anne marie Lambert

 

 

LA BATAILLE DE LUCHY (sur le panneau)

3  août : l'Allemagne déclare la guerre à la France

Entre le 6 et le 21 août, le sud du pays (BELGIQUE) est sillonné en tous sens par les organes de reconnaissance(s) des deux armées principalement composés de cavalerie et de quelques avions. Quelques escarmouches ont lieu entre cavaliers.

Le 20 août, le général français JOFFRE donne l’ordre d'offensive générale aux 3e et 4e armées. On fixe aux différents corps d'armée (ÇA) des objectifs à atteindre. Le 17e corps (général POLINE) vient de Sainte-Cécile et est organisé en 3 colonnes ayant pour objectifs, de gauche à droite, Anloy/Jéhonville/Ochamps. La colonne de droite est composée de la 33e division (DI) qui, par Bertrix, engage la 66e brigade (BI) soit, les 20e régiment d'infanterie (RI) et Ile RI ainsi que le 18e régiment d'artillerie (RAC) sur la route qui mène à Ochamps alors que la 65e BI (7e et 9e RI ) est postée en réserve de corps aux alentours d'Assenois/Blanche-Oreille où se trouve l'état-major (EMF) de POLINE.

En face d'eux, le 18e corps allemand composé des 25e ID et 21e ID fait face à Maissin/Anloy (25e ID) est à Ochamps/Libramont (21e ID). La 21e ID a poussé un détachement (87e IR un groupe d'artillerie du 27e régiment) à Ochamps le matin du 22 août tandis que le gros de la division s'installe aux alentours de Recogne/Neuvillers où l'EMA a établi ses quartiers.

Le matin du 22 août, le mouvement français sur Bertrix est repéré par un avion allemand en reconnaissance, ce qui précipite vers midi l'ordre pour le général VON OVEN de marcher sur l'ennemi par la route Recogne-Fays Les Veneurs. La bataille de Luchy va commencer et s'étaler sur 4 sites différents :

 

 

Le combat d'Ochamps - Lisière nord de la forêt de Luchv (13h30-17h00)

Le 20° RI, avant garde de la 33°Di débouche vers 13h30 de la lisière nord de la forêt de Luchy. Il est accueilli par un feu nourri d'artillerie en provenance de l'est du village (côte 468) et doit faire face à de l'infanterie traversant le village, Malgré de fortes pertes et après avoir contourné les hauteurs de la chapelle par l'ouest, des compagnies du 20e RI les occupent vers 15h. Mais ce combat sans soutien d'artillerie est inégal. L'intervention du 3e bataillon du 87° IR allemand, en réserve derrière la côte 468, qui contourne le village par le nord pour attaquer les positions de la chapelle à raison de la résistance française. Le 20° RI est refoulé vers la forêt en fin d'après-midi. Le colonel DETRIE, les commandants de bataillon FIAMMA et GREGORY, les capitaines NEGRIER ROCCHESANI, SEGUELAS sont parmi les morts.

Le combat de Bertrix - Lisière sud de la forêt de Luchv (14h30-16h00)

La colonne française s'est engagée toute entière dans la forêt sur la route d'Ochamps. Seule la queue de colonne du 18e RAC n'a pas encore pénétré dans la forêt de Luchy lorsque débouchent du bois

en provenance de Recogne, les Allemands de la 21° ID.

Ceux-ci ont en face d'eux les derniers canons français engagés sur la route forestière et le 2e bataillon du 11° RI qui ferme la marche de la colonne et qui s'apprête à bifurquer sur la route d'Ochamps.

La surprise est totale.

L'artillerie allemande se déploie à la sortie du bois et met en batterie pour tirer sur l'ennemi à vue.

Le 88° IR, en tête de colonne, se déplace également en tirailleurs et s'élance à l'assaut du 11° RI qui s'est déployé à cheval sur la route. La queue de la colonne d'artillerie est détruite sur place encombrant la route.

 

Le combat sous-bois (14h30-17h00)

La longue colonne allemande de la 21° ID sur la route de Recogne va pénétrer dans les bois à droite de la route à la rencontre de la colonne française sur la route d'Ochamps.

Le 1/80° l R (Major BONIN), est envoyé sur la petite route de Rossart qui rejoint la ferme de Luchy à Ochamps. Il va s'infiltrer dans la forêt de Luchy dans sa partie nord mais surtout et c'est le but de sa mission, faire liaison avec la 87° IR à Ochamps, ce qu'il arrive à faire en fin de journée. Il rencontrera des éléments du 20° RI qui se replient sur Bertrix et d'autres du 1/11° RI qui a été

envoyé en soutien du 20° RI mais qui ne dépassera guère la lisière.

Le III/11° RI qui encadre la colonne d'artillerie dans la partie sud de la forêt de Luchy va s'opposer aux Allemands en s'engageant dans les bois à droite de la route d'Ochamps.

En infériorité numérique, il est refoulé et la colonne d'artillerie est prise d'assaut malgré une résistance héroïque. Quatre batteries du 18e RAC restent sur place soit 16 canons !

Le reste de la colonne s'échappe finalement vers 16h30 par la route qui, de la Croix Morai, se dirige vers Acremont/Jéhonville mais une erreur d'orientation voit la colonne s'engager sur la côte 471

vers Blanche-Oreille où elle est la cible de l'artillerie ennemie.

La confusion gagne le reste de la colonne qui s'empêtre dans les clôtures ou dans les marécages en improvisant des voies de fuite.

9 canons sur 36 seulement échappent au carnage de cette journée. Ils rejoindront dans le plus grand désordre Assenois-Blanche Oreille.

L'infanterie (11°RI/20°RI) qui se replie sur Bertrix se heurte aux Allemands qui font beaucoup de prisonniers. Quelques français erreront dans les bois plusieurs jours voire plusieurs mois après le

combat avant de tenter de rallier la France ou les Pays-Bas.

Le combat de la Flèche (16h-17h30)

A 16h, le général POLINE donne l'ordre à la 65° BI, en réserve, de prendre position sur les hauteurs au nord de Bertrix. Le mouvement s'effectue dans un grand désordre car cette montée au front se heurte simultanément aux nombreux débris de troupes qui se replient. L'offensive manque de cohésion mais se concrétise tout de même par un déploiement des troupes des 7°et 9° RI au-delà des bois jouxtant la voie ferrée. Hélas, forts de leur succès à la lisière sud à la forêt de Luchy, les Allemands ont rapidement avancé des pièces d'artillerie et leur infanterie sur les hauteurs au nord de Bertrix et repoussent définitivement les Français au-delà de la voie ferrée. Ceux-ci tentent bien de se rétablir, mais le cœur n'y est plus et le désordre est trop important. Le repli par Bouillon et Herbeumont s'impose.

Bilan des pertes ? Hors de combat Français 4.434 Allemands 1.800


 

 

PUBLIÉ LE 11/11/1999 La Dépeche du Midi

Tué à leur tête, le plus jeune colonel de France

AOÛT 1914 : TARN-ET-GARONNAIS MASSACRÉS

            Des Tarn-et-Garonnais tués par milliers dès le début de la Grande Guerre. Un carnage étouffé à l'époque. Parmi eux, le Montalbanais Henri Détrie, plus jeune colonel de France.

            Comme chaque année, est célébré aujourd'hui, dans toutes les communes de France l'armistice du 11-novembre 1918-qui met fin à la «Grande Guerre». Un conflit qui a coûté des millions de morts, dont près de 1,3-millions en France. Parmi ces morts, de nombreux Tarn-et-Garonnais, tués notamment dans les premiers jours du conflit, lors de la bataille dite des «frontières». Au milieu de ces milliers d'hommes de notre département fauchés par les mitrailleuses et l'artillerie allemandes, le colonel du 20-e régiment d'infanterie, Henri Détrie.

            Il est environ 17-heures le samedi 22-août 1914, lorsque ce dernier est frappé mortellement à la tête de ses troupes, au débouché nord de la forêt de Luchy, qui donne accès au village d'Ochamps dans les Ardennes Belges, dernière étape fixée pour le cantonnement de la 33e division de Montauban. Henri Détrie était le plus jeune colonel de France. Il avait servi au Tonkin et Madagascar et ses états de service élogieux sont confirmés par le Maréchal Lyautey, le Général Galliéni ainsi que par le général Weygand qui fut le chef d'Etat- Major de Foch.

Une hécatombe !

            Depuis le début de cet après-midi du 22-août, le colonel placé à la tête de l'avant-garde de la division, avec son 3e bataillon, luttait pied-à-pied contre un ennemi qui avait surpris la colonne française. Les pertes considérables qu'il avait infligé aux nôtres avaient imposé la relève par le 1er bataillon du 20e RI, qui doublant le 3e bataillon, essaya à son tour de déboucher vers Ochamps. Une hécatombe, car les unités françaises n'étaient aidées par aucun appui d'artillerie. Aux morts tarn-et-garonnais s'ajoutaient les 500-victimes du 18e régiment d'artillerie d'Agen (sans compter toutes les autres unités «occitanes» décimées). A Montauban la nouvelle de la défaite de Bertrix ne sera pas diffusée. La veuve du colonel Détrie apprendra le décès officiel de son mari le 9-octobre 1914 ! Combien d'autres veuves à son image ? L'association Mémoire 82-présentera sur ces événements et sur la guerre 14-18 en général, entre le 12-et le 19-décembre, une importante exposition à Castelsarrasin, proche de celle présentée à Montauban en novembre 1998-e visitée par plus de 4000-personnes.

Des morts par milliers en une journée

            Après les combats du 22 août 1914, les troupes du Sud-ouest avaient été décimées. les chiffres des « disparitions » parlent d'eux-mêmes : - 11e RI de Montauban : 1000-soldats et officiers tués ; -20e RI de Montauban : 1500-soldats et officiers tués, dont le colonel Détrie ; - 18e régiment d'artillerie d'Agen : 500-tués ; - 9e RI d'Agen : 400-soldats tués ; - 7e RI de Cahors : 557-soldats et 14-officiers tués en trois heures ! - 59e RI de Pamiers : le colonel, deux commandants, les deux-tiers des officiers subalterne et le tiers des sous- officiers et soldats tués (sur un total de 3.335-hommes).

- 14e RI de Toulouse : 508-soldats et 14-officiers tués.

J.-Ph. C


 

Derniers moments du colonel Détrie

22 août 1914

A l'orée de la forêt de Luchy, une nouvelle menace surgit, mais à la droite de la ligne française. Vers l'est, la 9e compagnie du 20e RI voit le bataillon Krumm progresser pas bonds en direction de la forêt. De la lisière, la compagnie française fait face à droite. Bientôt, il lui faut soutenir un combat sous bois contre la tête de ce bataillon, qui y perd notamment le capitaine Hirschfeld. Une compagnie du 11e RI vient étoffer l'aile droite française dangereusement exposée.

Voilà des renforts bienvenus pour les hommes de Détrie. Le second régiment de la brigade Fraisse est en marche pour épauler le 20e. Aux deux bataillons du 11eRI qui se présentent, le général Fraise a commandé de se porter au secours de la première ligne. Le bataillon Roy (1er) a pour mission de renforcer le 20e RI à la lisière; le bataillon Wildermuth (3e) doit prolonger le front vers l'ouest. Roy occupe la lisière, à gauche de la route, et y recueille des isolés du 20e. A part des éclats d'obus, il n'est pas en contact avec l'ennemi. Par contre, il assiste à l'échec des tentatives de sortie de la forêt. Tandis que de nombreux blessés du 20e refluent vers l'intérieur des bois, les rescapés du régiment s'agglutinent à la lisière avec les rares officiers survivants. Le colonel détrie est aux premières loges. Il se tient debout à l’orée de la forêt, cent mètres à l’ouest de la route, réconfortant et encourageant ses soldats. Il voit tomber près de lui le capitaine Négrier. Le chef de la 1ére compagnie, le capitaine Fauqueux, assiste à la scène :

« Quand le colonel se releva, après s'être porté au secours du capitaine Négrier, je lui ai demandé par signes – la fusillade et le canon empêchaient  d'entendre – des nouvelles du camarade qui venait de tomber. Par gestes, le colonel me fit comprendre que Négrier était mort ou mourant. Le colonel se releva alors et, lentement, il alla s'adosser à un arbre à la lisière du bois, en pleine vue. Il se croisa les bras sur la poitrine, calme, maître entièrement de lui. C'est dans cette posture que je l'aperçus pour la dernière fois et c’est là qu'il a été frappé, qu'il est tombé sans une plainte, sans se relever (... ) A mon avis, le colonel a cherché la mort, ne voulant point survivre à la destruction de son régiment. »

Jean-Claude Delhez, Le jour de deuil de l’armée française, n° 1, 2011, 672 pages.

Jean-Claude Delhez, 55 Grand-rue, 55600 Thonne-la-Long (Fr).


 

PUBLIÉ LE 11/11/1998

Le massacre des Tarn-et-Garonnais !

UNE PAGE D'HISTOIRE, 22-AOÛT 1914...

 

Le massacre des Tarn-et-Garonnais !DDM

La guerre achevée le 11-novembre 1918 a commencé par un horrible massacre de soldats français sur les frontières. Au nombre des morts, 2500-hommes du Tarn-et-Garonne, fauchés en cinq heures de bataille, le 22 août 1914 !

On était en août. Les soldats français habillés de tuniques bleues et de pantalons rouges grimpaient en longues colonnes vers le front. La France était en guerre depuis trois semaines, une guerre grosse de quarante ans, de longues années de revanche ressassée. Le siècle était neuf, mais l'armée s'en allait au combat avec une vieille idée : attaquer, attaquer... La stratégie la plus simple qui soit.

            Faisant fi du feu mortel des mitrailleuses entrées dans l'âge adulte, et de l'artillerie à répétition, les canons pouvant tirer jusqu'à douze coups à la minute. Parmi les millions de soldats français, de très nombreux méridionaux vont faire les frais de cette impréparation de l'Etat-major à la guerre moderne. En particulier, au sein du 17-e corps d'armée, le 11e régiment d'infanterie de ligne et le 20e, deux unités d'extraction tarn-et-garonnaise, constituées à Montauban.

            Partis de la gare de Villenouvelle le 5-août, ils vont franchir la frontière belge le 21, pour prêter main forte aux troupes belges que les allemands décimaient. Ces deux régiments vont donc compléter le 17-e corps d'armée du général Poline, avec le 18e régiment d'artillerie. Le 22-août, sera le jour de leur massacre. En cinq heures, les deux unités du Tarn-et-Garonne vont compter 2500-morts !

Attaquer partout !

            Sur cette journée tragique, des témoignages existent. Ils sont sans appel ! Le lieutenant André Mittelhauser, du 11e RI note dans son carnet de route célèbre, nommé Bertrix, (du nom de la ville où les combats meurtriers vont se dérouler) : «Objectif : Ochamps (commune voisine). Mission : offensive sur toute la ligne, attaquer l'ennemi partout où il se trouvera !» Les Français débouchent sur le champ de bataille sous la direction de l'incroyable insouciance de leurs chefs. Depuis la veille, les soldats ennemis sont embusqués aux endroits stratégiques, notamment dans la forêt de Luchy et dans les alentours d'Ochamps. Les civils belges ont pourtant mis en garde les officiers français qu'ils croisent sur leur chemin, mais rien n'y fait, pas même l'avertissement d'un capitaine de cuirassiers, revenant de reconnaissance et qui fait remonter l'information au plus haut. Les ordres ne sont pas changés ! A 15-heures, le 20e RI s'engage dans la forêt de Luchy. Dans son sillage, suit péniblement la longue colonne du 18e régiment d'artillerie qui traîne ses 75, et son attirail de caissons. Un peu comme à la parade. Le 11e RI ferme la marche, placé en soutien à l'arrière.

            On imagine le cadre : de belles frondaisons, la douceur de la température, les colonnes qui montent au pas lent des chevaux, tout cela cheminant dans la fausse quiétude de la forêt.

    Le traquenard

            Le traquenard allemand va fonctionner à merveille. Le 20e débouche de la forêt, et aperçoit le clocher d'Ochamps. La fusillade éclate, les allemands retranchés, font un massacre des Tarn-et-Garonnais. Les français sont lancés à l'assaut par vagues que déciment les mitrailleuses. Un bataillon du 11e RI est appelé en renfort et tout en se faisant étriller, force les allemands aux dispositions de retraite. Mais ces derniers ont par ailleurs encerclé l'ensemble du dispositif français et l'artillerie s'est faite surpendre en pleine forêt, perdant 27-de ses canons, sur 36 ! En ce 22-août 14, les deux régiments montalbanais vont perdre 2500-hommes ! Le colonel Détrie, qui commande le 20e, voyant son régiment se dissoudre sous la mitraille, choisit plutôt la mort... On imagine le champ de bataille ! Partout des morts, des blessés agonisants...

            Plus que quelques rares survivants qui s'entraident comme ils peuvent, d'autres qui vont survivre isolés dans les forêts ! Le reste est mort ! D'ailleurs les cimetières à croix blanches de cette région de Belgique, qui portent gravés les noms des gars d'ici, témoignent encore de ce massacre.

            De cette horreur, seul l'Etat-major est coupable et pourtant, il va laisser naître à bon prix la légende de la faiblesse des gens du Midi en première ligne ! «Les méridionaux ont lâché !»... disait-on alors. Joffre, né à Rivesaltes, partageait-il cet avis ? Toujours est-il qu'il changera ensuite beaucoup de képis à feuilles de chêne, dont les errements sur le terrain ont coûté au pays des centaines de milliers de morts en quelques semaines.

            Finalement, ce sont les allemands qui ont reconnu au moins le courage des gars de Montauban, de Caussade ou de Castelsarrasin, ainsi qu'en témoigne un colonel : «Comment fut-il possible au 20-e RI qui avait subi de si lourdes pertes sous le feu de notre artillerie à la sortie de la forêt de Luchy... ait réussi à tourner notre position d'Ochamps. Si réellement le 20e a combattu seul, il peut être doublement fier de ses lauriers !» L'hommage des adversaires est venu bien avant la reconnaissance française du courage des soldats du Midi...

J.-Ph. CROS.

Combat d’Ochamps - forêt de Luchy (22 août 1914)

mardi 30 décembre 2008.

Cadre du combat

            Le 20 août 1914, le G.Q.G. français, voyant les armées allemandes défiler d’est en ouest sur le territoire belge, croit que le commandement allemand affaiblit son centre au profit de l’aile droite. Joffre décide de frapper au centre pour couper l’armée allemande en deux tronçons, dans la région des Ardennes belges. Il prescrit à la IVe armée de « porter cette nuit de fortes avant-gardes de toutes armes sur la ligne générale Bièvre - Paliseul - Bertrix - Straimont - Tintigny, pour assurer les débouchés de l’armée au-delà de la Semois ».

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